_____/ Par Driss SENDA
Hier, la Libye semblait encore être partagée entre espoir et désillusion de paix avant la signature de la Charte nationale de réconciliation Inter-libyenne d’Addis-Abeba, à l’initiative du président du Comité de haut niveau sur la Libye, Monsieur Denis Sassou N’Guesso, chef de l’Etat congolais. C’était le 14 février dernier, lors du 38e sommet de l’Union africaine.
Quand le philosophe Hegel dit que « rien de grand n’a été accompli dans le monde sans passion », de tout temps sur des questions liées à la géopolitique et à l’équilibre de la paix intra ou extra étatique, Denis Sassou N’Guesso n’a de cesse montré sa préoccupation de voir les pays africains se développer dans la paix et l’union nationale. Sa dernière visite du 11 décembre 2024 en Libye où il a rencontré les responsables clés susceptibles de sceller la paix dans ce pays exsangue suite à une guerre qui date depuis 2011 après la mort du président Mohamar Kadhafi, préfigurait déjà la signature de ladite Charte nationale de réconciliation Inter-libyenne d’Addis-Abeba.
Cet historique accord « contribue à dynamiser les voies de consultation et de coordination diplomatiques pour servir les intérêts du peuple libyen », a reconnu M. Taher Ba’âour, ministre libyen des Affaires étrangères et de la coopération internationale du gouvernement d’unité nationale. Cette capacité et ce succès sont à mettre à l’actif du président congolais Denis Sassou N’Guesso et l’ensemble d’autres dirigeants africains qui travaillent à ramener la paix dans ce pays, géant pétro-gazier d’Afrique du Nord, longtemps resté partagé entre arrangements précaires et compromis fragiles, sapant tout espoir sur l’avenir de la paix.
Le Comité de haut niveau sur la Libye s’est souvent appuyé sur un appel pressant à tous les acteurs politiques libyens à ’’s’abstenir de toute décision unilatérale susceptible d’accroître les tensions, d’alimenter les divergences, d’approfondir les divisions institutionnelles et de compromettre toute démarche constructive visant à réaliser l’unification des institutions de l’État, attendue de longue date ‘’. A ce propos, Brazzaville a souvent servi de plate-forme de travail et de concertation aux différentes autorités libyennes, aux représentants des clans ou tribus qui détiennent une grande influence en matière de cohésion nationale en Libye et qu’on peut repartir en trois grandes zones: la tripolitaine ( Tripoli), la cyrénaïque ( Benghazi), le Fezan ( sud).
Les Libyens placent en cette Charte de grands espoirs de réconciliation qui aboutiront sûrement à l’organisation des élections apaisées et consensuelles, qu’ils considèrent comme une opportunité décisive pour mettre un terme aux conflits politiques et armés qui déstabilisent le pays depuis mai 2011.
Ces efforts enclenchés aideront à résoudre une crise politique entre deux gouvernements. L’un désigné par un Conseil des députés en 2022 et dirigé actuellement par Ossama Hamad et basé à Benghazi (Est), dirigeant ainsi toute la région est et la majeure partie du sud du pays. L’influence du Maréchal Haftar y est visible. Le second qui est reconnu par l’ONU, est dit gouvernement d’unité nationale et est dirigé par Abdelhamid Dbeibah avec pour siège, Tripoli (ouest), dirigeant ainsi toute la région ouest du pays.
Tout intervient à un moment crucial pour la paix et la sécurité en Libye au delà d’un contexte international marqué par plusieurs événements, notamment la reconstruction d’un nouvel espace sahélien. L’UA semble en ressentir la température ambiante à tel point que les États africains membres de cette organisation continentale font des questions de sécurité en Libye, en Rdc et dans le Sahel, une priorité absolue. L’Afrique reste confrontée à de multiples défis dont celui de l’économie, de son industrie du commerce, attendu qu’avec son croissant pétrolier, la Libye ne manque pas d’être un acteur majeur dans le relèvement du PIB des pays d’Afrique.
Le pétrole aujourd’hui en Libye représente 95% des revenus du pays et permet notamment de payer les fonctionnaires qui représentent 80% des emplois. Il est extrait du croissant pétrolier, une zone stratégique qui se situe entre Syrte et Tobrouk et qui comprend 4 sites pétroliers majeurs : Zoueitina, Brega, AL Sedra et Ras Lanouf, lesquels représentent 70% des exportations pétrolières de la Libye. Elle dispose des réserves pétrolières estimées à 43,6 milliards de barils. Avant la guerre de l’OTAN de 2011, la Libye produisait 1,6 millions de barils par jour. Mais, depuis la prise de contrôle de cette zone du croissant pétrolier par le Maréchal Haftar, en septembre 2016 et avec les deux terminaux pétroliers qui sont près de Tripoli, la production oscille autour de 700 000 barils jour.
Ainsi, à cet enjeu économique s’ajoute l’enjeu stratégique, car celui qui contrôle le « croissant pétrolier » bénéficie d’un poids politique essentiel. D’où la remise du sabre symbolisant la paix du Maréchal Khalifa Belquasim Haftar au président Denis Sassou N’Guesso, en octobre 2023 à Brazzaville. C’est le signe manifeste d’un engagement indéfectible pour la paix et la reconstruction d’une Libye qui voudrait rejouer comme par le passé, sa partition pour l’avenir du continent africain.
L’émergence tranquille de ce pays de 6,735 millions d’habitants, son ouverture au monde avec la réinstallation d’un bureau de l’Union africaine sur son sol, à Tripoli, après une suspension prolongée, la signature de la Charte nationale de réconciliation, tous ces éléments marquent un tournant historique et renforcent le capital confiance de l’Union africaine en Denis Sassou N’Guesso, dont l’activisme récrée des conditions géopolitiques nouvelles dans cette grande région stratégique du monde.
Examinant la Situation en Libye lors de sa 1244 ème réunion, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine du 12 novembre 2024 avait à juste titre adressé à « Denis Sassou Nguesso, Président de la République du Congo et Président du Comité de Haut niveau de l’UA pour la Libye, ses « félicitations pour son action inlassable en faveur de la paix et de la réconciliation en Libye ; a exprimé son soutien aux efforts déployés par le Comité de Haut niveau de l’UA pour la Libye en vue de faciliter le processus de réconciliation en Libye ; et attend avec intérêt la tenue de la Conférence de Réconciliation nationale qui sera organisée par les Libyens eux-mêmes et dirigée par eux. »
Une reconnaissance qui vaut son pesant d’or, dans la mesure où ces efforts permettent de freiner la formation et la fusion des mouvements djihadistes, la formation des milices qui lançaient un certain nombre d’opérations de déstabilisation d’envergure autant en Libye que dans les pays voisins.
« Au nom de l’Afrique tout entière, je rends hommage au peuple libyen qui nous donne une fois encore, la preuve de sa sagesse, de sa maturité et son unité, en adhérant sans équivoque à la Charte de réconciliation », a déclaré Denis Sassou N’Guesso.